Qui mangeons-nous? Il est inhabituel d'user du "qui" à propos des animaux, hormis pour ceux qui, intégrés à la maison, ont reçu un nom et partagent la vie des êtres humains qui les y ont accueillis. " |
Florance Burgat, La cause des animaux pour un destin commun, 2015
|
Cette nouvelle a remporté le 2ème Prix du concours
Flop... flop...
Un bruit incessant...constant... apaisant... une rythmique qui cadence mon sombre quotidien.
...flop...
Je l'entends depuis ma plus tendre enfance.
Comment ai-je atterri ici ?
Je ne sais pas d'où je viens.
Ma vie est monotone.
Nous vivons à plusieurs dans notre espace grillagé et étriqué.
Ma plaie me tire de mes pensées...
Mes voisins s'affolent et me bousculent à la vue des gardiens, me projetant violemment contre le mur.
Je crie de douleur tant ma blessure me tiraille.
Ils approchent et nous remplissent nos bacs de nourriture.
Je ne peux plus rien avaler mais une envie m'attire à cette mangeaille.
Je grignote malgré le mauvais goût.
Soudain je repense à la douce chaleur de ma famille.
A la violence avec laquelle nous avons étés séparés.
Et la tristesse m'envahit.
Je me demande ce qu'ils sont devenus depuis notre dernier moment.
Je les ai aperçus un bref instant quand nous avons eu notre moment de liberté.
« Liberté » est un grand mot.
On nous accorde le droit de nous dégourdir un moment, juste le temps de s'étirer et de parler des nouvelles aux voisins.
Brusquement, certains d'entre nous sont mis à part.
Ils les évacuent.
Je suis prise dans la foule.
Sur le moment je ne me rends pas compte de ma situation.
Je ferme les yeux, espérant que cela se finisse vite.
Quand je les rouvre, l'espace nous entourant a changé.
Je me retrouve encore une fois dans une cellule, beaucoup plus grande où on est tous entassés les uns sur les autres.
Je suis désorientée, perdue.
Ce changement si brusque me perturbe. Pourquoi sommes-nous hors de notre zone ?
Une vague de panique m'envahit.
A travers les barreaux j'observe beaucoup de conflits entre les gardiens.
J'ai mal à la tête.
Ils se disputent depuis un bon moment sans qu'on ne bouge.
De quoi parlent-ils ?
J'oublie un instant que je me trouve en terre inconnue.
Je réalise que la plupart de mes camarades somnolent.
Personne à qui se confier, seule.
On change d'endroit. On est emmenés sur un engin roulant.
Une secousse fait s'entrechoquer les grilles qui nous entourent, créant une ouverture.
Personne ne semble avoir remarqué ce défaut mais l'ouverture de la cage est assez grande pour se faufiler.
Une petite voix me dit d'aller explorer les environs.
Je me glisse afin d'atteindre la douce brise.
Je reviendrai raconter mes péripéties à mes amis plus tard !
Je sens que nous nous arrêtons.
Des voix se rapprochent, je me cache dans un coin.
Les hommes ouvrent la porte et une lumière baigne soudainement la pièce roulante où nous nous trouvons.
De là où je suis personne ne peut me voir.
Les deux hommes sortent avec des cages et s'éloignent.
J'en profite pour sortir de ma cachette et m'enfuis.
Je regarde les environs, je me trouve dans un hangar lugubre.
Par chance une porte est ouverte, certainement celle par laquelle nous sommes entrés.
Je n'hésite pas un instant, les hommes peuvent revenir à tout moment.
Je me précipite vers la sortie et l'atteins plutôt rapidement.
La lueur du jour m'éblouit et le temps de m'habituer à celle-ci je comprends que je suis enfin dehors !
Une soudaine envie d'aventure m'envahit.
Mais ce n'est pas le moment de traîner, quelqu'un pourrait encore me repérer.
Je cherche un moyen pour sortir de cette enceinte, peut être qu'il y a une autre faille.
Je suis perdue dans cette immensité.
Le soleil se couche.
Des nuances d'orange et de rouge se mélangent dans le ciel bleu donnant un joli dégradé.
Mes efforts payeront et je pourrais, une fois sortie, profiter d'une vie sans angoisse.
Il faut faire attention aux rondes et je commence à fatiguer.
Pour une fois depuis longtemps j'ai de nouveau une vraie sensation de faim.
Il fait de plus en plus sombre, la nuit tombe.
Je vois au loin une lumière et m'en approche.
Elle provient d'un bâtiment.
Il commence à faire froid et le vent se lève.
Je pourrais me blottir contre le mur afin de me protéger.
Cette lumière me réchauffe.
Je lève la tête puis essuie la buée sur la fenêtre.
Je plisse les yeux et distingue l'intérieur de la bâtisse.
Je n'en crois pas mes yeux !
Une vision d'horreur.
Mes amis, ma famille, qui sont attachés par les membres inférieurs, pendus dans le vide.
Morts.
Coupés en leur milieu, du sang coule de leurs ventres.
Je suis épouvantée par cette vue, des larmes coulent sur mes joues.
Je ne peux pas rester ici sinon je finirai comme eux !
Je cours, il faut que je me cache.
Les bâtiments défilent sans que je puisse trouver mon échappatoire mais en les longeant je débouche sur une grille sans fin.
Plusieurs heures passent avant que je ne repère une crevasse.
Je me glisse dans l'ouverture de la clôture mais ses fils de fer me tailladent dans la chair.
Je suis obligée de continuer à avancer malgré la douleur.
Je m'extirpe de ces griffes de fers. Suis-je enfin libre ?
Je cours car ma vie en dépend et mes pieds me font atrocement mal.
Les branches me fouettent et empirent la douleur de mes blessures.
Le sang coule sur ma peau.
Je n'en peux plus.
Je m'écroule de fatigue.
Le vent souffle.
Je me recroqueville contre un arbre.
Je repense à mes amis, ma famille puis je plonge dans les bras de Morphée.
Une vive lumière m'éblouit... différente de celle de notre endroit et beaucoup plus chaleureuse.
Elle est réconfortante et nostalgique.
Aux alentours, une épaisse végétation m'entoure. Une chose que je n'ai jamais vue.
Dans la précipitation d'hier soir, je n'avais pas fait attention au changement de mon environnement.
Je suis entourée de brins qui dépassent ma tête et où la lueur du soleil reflète ses rayons dorés.
Je tournoie entre les tiges, j'effleure les branchages, je sautille et ressens cette indépendance dont on nous a privés.
De toute ma misérable vie je n'ai jamais éprouvé une telle excitation en découvrant ce monde méconnu.
Jusque là je n'en avais jamais pris conscience, mais sous mes pieds nus se trouve un sol tout moelleux.
Une sensation nouvelle, contrairement aux grilles de fer et qui apaise la plante de mes pieds.
Je commence à m'éloigner sans objectif vers une destination inconnue.
Je m'enfonce ensuite dans une végétation verdoyante.
Le temps passe rapidement, je n'ai plus aucun repère dans la forêt.
J'entends au loin un bruit.
Je le suis.
Au bout d'un petit moment il n'y a plus rien.
Je m'arrête, le vrombissement recommence.
Je m'y dirige.
Je suis à la lisière de la forêt.
Quelque chose de dur et noir se trouve au sol.
Il n'y a plus de grondement.
Prudemment, j'avance à tâtons.
Le bruit revient, cette fois c'est lui qui se rapproche de moi.
Je me tourne vers lui.
Quelque chose de grand fonce vers moi.
Je suis pétrifié, je n'ose plus bouger mais ça s'arrête.
Quand je les rouvre, un engin est posté devant moi.
Juste devant mon nez.
Des gens en sortent, l'air inquiet.
Ils posent une couverture sur moi.
Elle me réchauffe.
Les personnes m'aident à monter dans la machine.
Je sens que nous nous déplaçons.
Ils ont l'air inquiets et nerveux.
Je commence à somnoler.
Quand je me réveille je suis dans une pièce blanche.
Une femme me soigne.
Je ne m'affole pas car elle dégage une aura bienveillante.
Elle pose un linge sur ma plaie.
Ça pique un peu mais intérieurement cela me soulage.
Puis elle m'enroule des bandes tout autour de mes lésions.
Un homme entre dans la pièce.
« Bonjour vous m'avez appelé pour une urgence...
- Oui, une famille l'a trouvé près d'une forêt et ce n'est pas un animal sauvage pour cet habitat. Après examen, j'ai trouvé un numéro de matricule dans son oreille. Ses plaies et cicatrices sont anormales et certainement dues à une cage, j'en ai déduit qu'il fallait vous contacter ! »
La vétérinaire passe le relais concernant cette affaire suspecte au journaliste, Ben. Il fait partie d'un groupe de bénévoles luttant pour l'éthique des animaux et ce n'est pas la première fois qu'il est confronté à ce problème. Travaillant dans le domaine et bien informé de tous les élevages et abattoirs de la région, il ne trouve aucun lien avec cet animal. C'est en demandant le lieu où le petit être a été recueilli qu'il commence son enquête. Sur google maps, il repère la forêt qui borde un petit village et aux alentours, un champ. La route arpente ces différents milieux et aucun bâtiment se trouve à proximité. Bizarre, pourtant un lapin désorienté et blessé ne peut s'échapper d'un endroit situé aussi loin. Les images satellites datent de plusieurs années et n'ont pas été actualisées. Alors tous les bâtiments récemment construits ne s'affichent pas et ce pour n'importe quelle localisation. Pour en avoir le cœur net, il se rend sur place. Après une demi-heure de route, le jeune homme se gare dans la forêt. Il commence à se repérer avec le GPS de son téléphone et longe la route. La famille avait précisé que l'animal était apparu à droite. Il se met aussitôt à s'enfoncer dans la forêt. Et au loin, de l'autre côté du champ, il discerne un grillage et un entrepôt. Ben se rapproche et se couche dans les hautes herbes. Il repère s'il y a des caméras, par chance il n'y en a pas ! Il se rapproche prudemment du portail, court jusqu'au mur le plus proche et s'y appuie. Il est sous une fenêtre, se retourne pour voir au travers et regarde attentivement. Dans le hangar il aperçoit cinq hommes, beaucoup de machines de découpe, des bacs et beaucoup de lapins dans des chariots. Tout semble être un abattoir médiocre au vu des conditions sanitaires. Le militant se déplace vers les poubelles à sa droite, ouvre une première qui est rempli de flacons de médicaments, puis ouvre l'autre et là le choc. Une odeur nauséabonde en émane et elle est pleine de cadavres de lapins. Ben cherche son téléphone et prend des photos des lieux et de ses découvertes. Il veut appeler mais n'a pas de réseau. Il faut qu'il s'éloigne pour appeler les autres membres de l'association. Il sort de l'enceinte et se redirige vers la voiture. Une fois celle-ci atteinte, il peut enfin les contacter ! Cependant, il n'a pas vu de logo ou une possibilité que l'établissement soit une firme légale. A une réunion de l'association, il expose le problème avec des preuves d'un potentiel abattoir qui ne respecte pas les normes. Après un débat sur le choix de leurs actions possibles, ils décident de faire appel à la gendarmerie. Sans eux, aucune fouille n'est possible tant qu'ils n'auront pas une autorisation de perquisition.
Plusieurs jours passent et avec l'autorisation du juge obtenue, ils foncent vers ce hangar insalubre.
Un bruit incessant...constant... apaisant... une rythmique qui cadence mon sombre quotidien.
...flop...
Je l'entends depuis ma plus tendre enfance.
Comment ai-je atterri ici ?
Je ne sais pas d'où je viens.
Ma vie est monotone.
Nous vivons à plusieurs dans notre espace grillagé et étriqué.
Ma plaie me tire de mes pensées...
Mes voisins s'affolent et me bousculent à la vue des gardiens, me projetant violemment contre le mur.
Je crie de douleur tant ma blessure me tiraille.
Ils approchent et nous remplissent nos bacs de nourriture.
Je ne peux plus rien avaler mais une envie m'attire à cette mangeaille.
Je grignote malgré le mauvais goût.
Soudain je repense à la douce chaleur de ma famille.
A la violence avec laquelle nous avons étés séparés.
Et la tristesse m'envahit.
Je me demande ce qu'ils sont devenus depuis notre dernier moment.
Je les ai aperçus un bref instant quand nous avons eu notre moment de liberté.
« Liberté » est un grand mot.
On nous accorde le droit de nous dégourdir un moment, juste le temps de s'étirer et de parler des nouvelles aux voisins.
Brusquement, certains d'entre nous sont mis à part.
Ils les évacuent.
Je suis prise dans la foule.
Sur le moment je ne me rends pas compte de ma situation.
Je ferme les yeux, espérant que cela se finisse vite.
Quand je les rouvre, l'espace nous entourant a changé.
Je me retrouve encore une fois dans une cellule, beaucoup plus grande où on est tous entassés les uns sur les autres.
Je suis désorientée, perdue.
Ce changement si brusque me perturbe. Pourquoi sommes-nous hors de notre zone ?
Une vague de panique m'envahit.
A travers les barreaux j'observe beaucoup de conflits entre les gardiens.
J'ai mal à la tête.
Ils se disputent depuis un bon moment sans qu'on ne bouge.
De quoi parlent-ils ?
J'oublie un instant que je me trouve en terre inconnue.
Je réalise que la plupart de mes camarades somnolent.
Personne à qui se confier, seule.
On change d'endroit. On est emmenés sur un engin roulant.
Une secousse fait s'entrechoquer les grilles qui nous entourent, créant une ouverture.
Personne ne semble avoir remarqué ce défaut mais l'ouverture de la cage est assez grande pour se faufiler.
Une petite voix me dit d'aller explorer les environs.
Je me glisse afin d'atteindre la douce brise.
Je reviendrai raconter mes péripéties à mes amis plus tard !
Je sens que nous nous arrêtons.
Des voix se rapprochent, je me cache dans un coin.
Les hommes ouvrent la porte et une lumière baigne soudainement la pièce roulante où nous nous trouvons.
De là où je suis personne ne peut me voir.
Les deux hommes sortent avec des cages et s'éloignent.
J'en profite pour sortir de ma cachette et m'enfuis.
Je regarde les environs, je me trouve dans un hangar lugubre.
Par chance une porte est ouverte, certainement celle par laquelle nous sommes entrés.
Je n'hésite pas un instant, les hommes peuvent revenir à tout moment.
Je me précipite vers la sortie et l'atteins plutôt rapidement.
La lueur du jour m'éblouit et le temps de m'habituer à celle-ci je comprends que je suis enfin dehors !
Une soudaine envie d'aventure m'envahit.
Mais ce n'est pas le moment de traîner, quelqu'un pourrait encore me repérer.
Je cherche un moyen pour sortir de cette enceinte, peut être qu'il y a une autre faille.
Je suis perdue dans cette immensité.
Le soleil se couche.
Des nuances d'orange et de rouge se mélangent dans le ciel bleu donnant un joli dégradé.
Mes efforts payeront et je pourrais, une fois sortie, profiter d'une vie sans angoisse.
Il faut faire attention aux rondes et je commence à fatiguer.
Pour une fois depuis longtemps j'ai de nouveau une vraie sensation de faim.
Il fait de plus en plus sombre, la nuit tombe.
Je vois au loin une lumière et m'en approche.
Elle provient d'un bâtiment.
Il commence à faire froid et le vent se lève.
Je pourrais me blottir contre le mur afin de me protéger.
Cette lumière me réchauffe.
Je lève la tête puis essuie la buée sur la fenêtre.
Je plisse les yeux et distingue l'intérieur de la bâtisse.
Je n'en crois pas mes yeux !
Une vision d'horreur.
Mes amis, ma famille, qui sont attachés par les membres inférieurs, pendus dans le vide.
Morts.
Coupés en leur milieu, du sang coule de leurs ventres.
Je suis épouvantée par cette vue, des larmes coulent sur mes joues.
Je ne peux pas rester ici sinon je finirai comme eux !
Je cours, il faut que je me cache.
Les bâtiments défilent sans que je puisse trouver mon échappatoire mais en les longeant je débouche sur une grille sans fin.
Plusieurs heures passent avant que je ne repère une crevasse.
Je me glisse dans l'ouverture de la clôture mais ses fils de fer me tailladent dans la chair.
Je suis obligée de continuer à avancer malgré la douleur.
Je m'extirpe de ces griffes de fers. Suis-je enfin libre ?
Je cours car ma vie en dépend et mes pieds me font atrocement mal.
Les branches me fouettent et empirent la douleur de mes blessures.
Le sang coule sur ma peau.
Je n'en peux plus.
Je m'écroule de fatigue.
Le vent souffle.
Je me recroqueville contre un arbre.
Je repense à mes amis, ma famille puis je plonge dans les bras de Morphée.
Une vive lumière m'éblouit... différente de celle de notre endroit et beaucoup plus chaleureuse.
Elle est réconfortante et nostalgique.
Aux alentours, une épaisse végétation m'entoure. Une chose que je n'ai jamais vue.
Dans la précipitation d'hier soir, je n'avais pas fait attention au changement de mon environnement.
Je suis entourée de brins qui dépassent ma tête et où la lueur du soleil reflète ses rayons dorés.
Je tournoie entre les tiges, j'effleure les branchages, je sautille et ressens cette indépendance dont on nous a privés.
De toute ma misérable vie je n'ai jamais éprouvé une telle excitation en découvrant ce monde méconnu.
Jusque là je n'en avais jamais pris conscience, mais sous mes pieds nus se trouve un sol tout moelleux.
Une sensation nouvelle, contrairement aux grilles de fer et qui apaise la plante de mes pieds.
Je commence à m'éloigner sans objectif vers une destination inconnue.
Je m'enfonce ensuite dans une végétation verdoyante.
Le temps passe rapidement, je n'ai plus aucun repère dans la forêt.
J'entends au loin un bruit.
Je le suis.
Au bout d'un petit moment il n'y a plus rien.
Je m'arrête, le vrombissement recommence.
Je m'y dirige.
Je suis à la lisière de la forêt.
Quelque chose de dur et noir se trouve au sol.
Il n'y a plus de grondement.
Prudemment, j'avance à tâtons.
Le bruit revient, cette fois c'est lui qui se rapproche de moi.
Je me tourne vers lui.
Quelque chose de grand fonce vers moi.
Je suis pétrifié, je n'ose plus bouger mais ça s'arrête.
Quand je les rouvre, un engin est posté devant moi.
Juste devant mon nez.
Des gens en sortent, l'air inquiet.
Ils posent une couverture sur moi.
Elle me réchauffe.
Les personnes m'aident à monter dans la machine.
Je sens que nous nous déplaçons.
Ils ont l'air inquiets et nerveux.
Je commence à somnoler.
Quand je me réveille je suis dans une pièce blanche.
Une femme me soigne.
Je ne m'affole pas car elle dégage une aura bienveillante.
Elle pose un linge sur ma plaie.
Ça pique un peu mais intérieurement cela me soulage.
Puis elle m'enroule des bandes tout autour de mes lésions.
Un homme entre dans la pièce.
« Bonjour vous m'avez appelé pour une urgence...
- Oui, une famille l'a trouvé près d'une forêt et ce n'est pas un animal sauvage pour cet habitat. Après examen, j'ai trouvé un numéro de matricule dans son oreille. Ses plaies et cicatrices sont anormales et certainement dues à une cage, j'en ai déduit qu'il fallait vous contacter ! »
La vétérinaire passe le relais concernant cette affaire suspecte au journaliste, Ben. Il fait partie d'un groupe de bénévoles luttant pour l'éthique des animaux et ce n'est pas la première fois qu'il est confronté à ce problème. Travaillant dans le domaine et bien informé de tous les élevages et abattoirs de la région, il ne trouve aucun lien avec cet animal. C'est en demandant le lieu où le petit être a été recueilli qu'il commence son enquête. Sur google maps, il repère la forêt qui borde un petit village et aux alentours, un champ. La route arpente ces différents milieux et aucun bâtiment se trouve à proximité. Bizarre, pourtant un lapin désorienté et blessé ne peut s'échapper d'un endroit situé aussi loin. Les images satellites datent de plusieurs années et n'ont pas été actualisées. Alors tous les bâtiments récemment construits ne s'affichent pas et ce pour n'importe quelle localisation. Pour en avoir le cœur net, il se rend sur place. Après une demi-heure de route, le jeune homme se gare dans la forêt. Il commence à se repérer avec le GPS de son téléphone et longe la route. La famille avait précisé que l'animal était apparu à droite. Il se met aussitôt à s'enfoncer dans la forêt. Et au loin, de l'autre côté du champ, il discerne un grillage et un entrepôt. Ben se rapproche et se couche dans les hautes herbes. Il repère s'il y a des caméras, par chance il n'y en a pas ! Il se rapproche prudemment du portail, court jusqu'au mur le plus proche et s'y appuie. Il est sous une fenêtre, se retourne pour voir au travers et regarde attentivement. Dans le hangar il aperçoit cinq hommes, beaucoup de machines de découpe, des bacs et beaucoup de lapins dans des chariots. Tout semble être un abattoir médiocre au vu des conditions sanitaires. Le militant se déplace vers les poubelles à sa droite, ouvre une première qui est rempli de flacons de médicaments, puis ouvre l'autre et là le choc. Une odeur nauséabonde en émane et elle est pleine de cadavres de lapins. Ben cherche son téléphone et prend des photos des lieux et de ses découvertes. Il veut appeler mais n'a pas de réseau. Il faut qu'il s'éloigne pour appeler les autres membres de l'association. Il sort de l'enceinte et se redirige vers la voiture. Une fois celle-ci atteinte, il peut enfin les contacter ! Cependant, il n'a pas vu de logo ou une possibilité que l'établissement soit une firme légale. A une réunion de l'association, il expose le problème avec des preuves d'un potentiel abattoir qui ne respecte pas les normes. Après un débat sur le choix de leurs actions possibles, ils décident de faire appel à la gendarmerie. Sans eux, aucune fouille n'est possible tant qu'ils n'auront pas une autorisation de perquisition.
Plusieurs jours passent et avec l'autorisation du juge obtenue, ils foncent vers ce hangar insalubre.
Grand Est : perquisition d'un abattoir clandestin
Les membres de l'association X ont démantelé avec les gendarmes et des services vétérinaires un groupe d'ouvriers qui travaillaient au noir. Ils font partie d'un sous-groupe d'un élevage de lapins pour "arrondir leurs fins de mois". Le bâtiment en ruine se trouvait sur un terrain en friche d'un des fermiers et empruntait le chemin des tracteurs pour ne pas se faire repérer.
Le porte-parole de la Fondation X a révélé avoir engagé des poursuites pénales à l'encontre des organisateurs. L’abattage clandestin est passible de 6 mois de prison et 15 000 euros d'amende.
Les animaux, le plus souvent malades, gravement blessés et non sélectionnés par les abattoirs acheteurs sont envoyés ici afin d'augmenter leur production.
On retrouve plusieurs facteurs qui aggravent leur peine comme le dysfonctionnement de leur matériel, l'environnement insalubre, le personnel incompétent et la négligence du bien-être animal.
Consommer de la viande revient à cautionner et même à financer la souffrance des animaux dans les élevages intensifs et leur mise à mort dans les abattoirs.
Ben Dubois
Bulle & Belle